Un monde développé, solidaire et équilibré, reflétant le principe de l’incarnation du Verbe qui s’est fait chair : voilà l’idéaltype de monde que prône l’Église catholique romaine. Les voies pour y parvenir sont l’objet de tout un enseignement social constamment réadapté au contexte du moment.
A l’indépendance des pays anciennement colonisés par l’Europe, la préoccupation principale qui se posait aux nouveaux États africains était celle de la construction des États-nations dans laquelle le développement occupait une place centrale. Kwame Nkrumah rappelait d’ailleurs que l’indépendance politique n’était que formelle et que la véritable indépendance était celle du développement économique. Cette question du développement impliquait la résolution de la question sociale qui était déjà posée dans l’Europe du XIXe siècle où l’industrialisation avait provoqué une fracture entre la bourgeoisie et le prolétariat. Les chrétiens sociaux, souvent des laïcs, s’étaient engagés à résoudre les problèmes causés par les effets pervers de l’industrialisation en créant des organisations de solidarité et de charité. Entérinant cet engagement, le pape Léon XIII avait rédigé en 1891 l’encyclique Rerum novarum qui analysa la question sociale spécifique au contexte de l’Europe et de l’Occident au XIXe siècle et orienta sur le plan doctrinal sa résolution. Cette encyclique ouvre une tradition de formulation d’un discours pour donner la position de l’église sur les problèmes sociaux du moment, sa compréhension des faits et l’orientation qu’elle prescrit pour apporter les solutions les plus appropriées à leur résolution. Le discours social de l’Église prend donc racine dans les contextes toujours mouvants parfois à grande vitesse de l’évolution de l’humanité.